De même que les descendants de Clovis, les héritiers de Charlemagne ne furent pas digne de leur ancêtre, et ils perdirent l’empire que celui-ci leur avait laissé.
Le fils de Charles le Grand s’appelait Louis, et on le surnomma le Débonnaire, ce qui était une manière polie de dire le Faible ou le Sot . Il ne sut se faire obéir de personne, des révoltes éclatèrent et le désordre se mit partout.
Tandis qu’on respectait Charlemagne, on se moqua de Louis le Débonnaire, et, deux fois, on l’enferma dans un couvent avec des moines, après l’avoir obligé à demander pardon de ses fautes et à s’habiller en pénitent.
Ce fut encore pire quand il fut mort, car ses trois fils se battirent entre eux. Et, après la bataille, ils décidèrent de se partager l’empire de Charlemagne, ce qui fut accompli au traité de Verdun.
Tâchez de vous rappeler le nom de ce traité, car c’est de là que datent beaucoup de choses qui sont arrivées par la suite.
Des trois frères, Charles le Chauve eut la France, Louis le Germanique eut l’Allemagne. Quant à Lothaire, qui était l’aîné, il garda le titre d’empereur avec l’Italie. Mais comme sa part était plus petite que celle des autres, on lui donna un long morceau de terre qui découpait la France en remontant des Alpes jusqu’au Rhin et qu’on appela du nom de Lothaire, la Lotharingie ou Lorraine.
Ainsi la France fut privée de ses provinces de l’est. Et c’est pour les reprendre ou les garder contre ceux qui prétendaient détenir leurs droits de Lothaire que les Français ont dû se battre pendant plus de mille ans et jusqu’à nos jours.
On n’était pourtant pas au bout des malheurs, car Charles le Chauve, devenu roi de France, était aussi incapable que son père. Et comme Charlemagne l’avait pressenti, il ne sut même pas arrêter les pirates qui sillonnaient la mer de leurs barques toujours plus nombreuses et, s’enhardissant, descendaient sur les côtes et remontaient les fleuves pour piller le pays.
Alors, les Français, voyant que le roi ne venait pas à leur aide, donnèrent leur confiance à ceux qui se mettaient à leur tête pour résister aux farouches Northmans.
C’est ainsi que Robert le Fort se rendit célèbre. Il était, dit la légende, le fils d’un boucher de Dreux qui s’appelait Capet. Après de nombreux combats où il se conduisit valeureusement, il fut tué en repoussant le brigand Hastings. Mais le souvenir de Robert le Fort vivra, et ses descendant seront les Capétiens, futurs rois de France.
Cependant, un peu partout, dans la désolation générale, il y avait des chefs que chaque canton ou chaque ville se donnait pour avoir un protecteur. Au lieu d’un royaume, il en naissait des centaines. C’est ainsi que commença la féodalité.
Quant au roi, il ne comptait plus pour rien. On n'aurait pas cru que c’était le successeur de Charlemagne ! Il était devenu aussi inutile que les rois fainéants.
Charles le Gros se déshonora tout à fait quand il abandonna Paris, que les Northmans étaient venus attaquer avec leur capitaine Rollon, un géant si grand, qu’il allait toujours à pied, ne pouvant trouver un cheval assez fort pour le porter.
Paris, qui devait, dans la suite des siècles subir tant d’autres sièges, résista héroïquement pendant de longs mois. Du haut de leurs murailles, les Parisiens jetaient sur l’ennemi de l’huile bouillante et de la cire fondue, et ils étaient commandés par un vaillant, Eudes, fils de Robert le Fort.
Si Charles le Gros avait voulu, il aurait mis Rollon en fuite. Mais il préféra lui donner de l’argent pour qu’il s’en allât. Les Parisiens furent indignés de cette lâcheté, et tout le monde le fut avec eux, car on priva Charles le Gros de sa couronne, et Eudes fut choisi à sa place pour continuer la guerre contre les Northmans.
Dès ce moment, les Capétiens auraient pu régner sur la France. Mais comme nous venons de le voir, chaque seigneur était devenu maître chez lui et refusait d’obéir à un supérieur. Chacun se regardait comme un véritable roi sur sa propre terre. Les féodaux aimaient bien mieux des souverains faibles, comme les derniers Carolingiens, qu’un chef énergique. Aussi, quand Eudes fut mort, s’empressèrent-ils de rappeler un prince de la race du Débonnaire et qu’on appelait Charles le Simple, c'est-à-dire le pauvre d’esprit.
Il méritait bien son surnom, car c’est lui qui, au lieu de chasser le pirate Rollon, lui donna un grand beau pays, qui, étant devenu le domaine des Northmans, fut désormais la Normandie.
Heureusement il y avait la famille de Robert le Fort, sinon toute la France aurait fini par s‘en aller en petits morceaux.